Cancer de la prostate : parler pour lutter contre « la paralysie de l’érection »

Lutter contre le tabou du cancer de la prostate. En parler, depuis le dépistage des PSA jusqu’à la panne sexuelle, engendrée par l’ablation de la prostate. Tel était l’objectif de l’Institut de Cancérologie de Bourgogne pour ce mois de sensibilisation aux cancers masculins, lorsqu’il a programmé la représentation de la pièce l’Ablation, interprétée par Robert Benoit, suivie d’une conférence-débat avec les médecins radiothérapeutes de l’ICB, des oncologues médicaux, des urologues et sexologues. Ces représentations ont eu lieu à Dijon et Auxerre, les 21 et 23 novembre.

Lors du débat animé par les médecins, à Dijon.

L’Ablation, c’est un monologue intime et touchant, d’un patient qui vient de subir une ablation de la prostate et se livre sans détour. « La drôle de sensation la première fois qu’il n’a plus ressenti de désir pour une femme » ; « le cancer qui dérange et les gens, même les plus proches, qui changent leur regard parce qu’ils projettent leur angoisse de la maladie et de la mort » ; « la paralysie de l’érection », obsédante ; « la déprime » qui arrive, à force de « se sentir diminué à cause d’un organe que l’on a retiré sans l’espoir d’une prothèse » ; « les couches pour hommes, une honte » et « l’humiliation de l’incontinence qui ne prévient pas » ; l’incapacité de reprendre son travail ; ce mot « impuissant » qui est « violent, fort, dramatique » et pour tenter d’y remédier, les pilules, les injections intraveineuses ; la pensée du suicide. Ce patient, incarné par l’acteur Robert Benoit, dresse le tableau de tous les effets secondaires et psychologiques pesants liés au traitement de ce cancer qui porte atteinte à la virilité des hommes. « Mais je dois continuer à vivre et ne plus penser à ce qui me manque », conclut-il pour mieux ouvrir le débat.

Et le premier constat, c’est qu’aujourd’hui, et depuis longtemps, en cancérologie, les femmes relatent leurs problèmes sexuels. Il faut que les hommes aussi arrivent à parler de leurs difficultés aussi ouvertement.

Les nombreux professionnels de santé qui ont animé le débat, mercredi 23 novembre, autour du comédien Robert Benoit.

Des traitements permettent de récupérer les fonctions érectiles, mais cela peut prendre du temps. Ce qu’il faut avant tout, conseille Sébastien Landry, sexologue, « c’est garder à l’esprit que ce qui compte dans la sexualité, ce n’est pas la performance, mais le plaisir partagé ou solitaire. On peut avoir un orgasme avec un sexe au repos, car l’orgasme, c’est le cerveau qui le commande. Le cerveau est un organe sexuel. La sexualité est un sujet tellement vaste qu’il est dommage de le résumer à la pénétration. Il faut en parler, communiquer. »
La rééducation du périnée est aussi très importante dans la fonction érectile, autant que dans la fonction urinaire. Les professionnels de santé s’accordent à dire qu’elle doit être réalisée par un kinésithérapeute spécialisé.
Quant à la perte de libido, elle ne doit pas être un sujet de culpabilité, car elle est la conséquence de traitements, comme l’hormonothérapie, qui bloquent la production de testostérone. Là encore, la communication avec sa(son) partenaire est primordiale.

Dans le public, au théâtre d’Auxerre, lors de la soirée débat-théâtre.

Avant, pendant et après un traitement en cancérologie, l’essentiel est de préserver une qualité de vie. Pour ce faire, les médecins qui ont animé les débats, sont unanimes : « il faut libérer la parole et s’appuyer sur les soins de supports qui gravitent autour des traitements : soutien psychologique, activité physique, sophrologie, diététique… »

Remerciements
Le comédien Robert Benoit ; les Docteurs Alexis LEPINOY et Matthieu CAUBET, oncologues-radiothérapeutes de l'ICB ; les Docteurs Anne-Laure VILLING et Noémie GASSIAN, oncologues médicales ; les Docteurs Florian BARDET, Alain-Daniel FOAHOM KAMWA, Nordine DEFFAR, Bernard MAKHOUL et Adile OUZZANE, urologues ; le Docteur Johann BARKATZ, sexologue et Sébastien LANDRY, ingénieur en APA-Santé et psychosexologue spécialisé en cancérologie ; le Docteur Serge Tchérakian, président du comité de l'Yonne de la Ligue contre la Cancer ; le Centre hospitalier d'Auxerre et l'Institut d'Urologie d'Auxerre ; Monsieur Fabrice BIONDI du Laboratoire Astellas et les représentants des usagers de l'ICB : Monsieur Christian DECOMBARD (association Dépendances 21) et Monsieur Armand FAGES (association Transhépate BFC) ; ainsi que les équipes de l'ICB, du Darcy Comédie à Dijon et du Théâtre d'Auxerre.